ACADEMIY DU GALO

Académie du Gallo


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Les Dossiers linguistiques de l'Académie du Gallo

La Pepineray : "Foncer"


FONCER


En remontant le temps, nous retrouvons au XI° siècle la graphie fons. Or la consonne finale était alors prononcée ce qui a entraîné les dérivés en /s/ que nous connaissons aujourd’hui tant en français qu’en gallo.

Le verbe foncer en fait partie. Sémantiquement, son sens est plus large en gallo.

Il a le sens d’enfoncer (ça fonce den le prae ; ça enfonce, quand c’est trop mouillé), ce qui peut même aller jusqu’à l’enlisement.

Mais son sens originel est donner un fond. C’est ainsi qu’on fonce ûne chaere (on donne un fond à une chaise, en paille le plus souvent ; la palhe de seigl fonce ben lez chaeres).
    L’usage agricole fait qu’on fonce le tait également, c’est-à-dire qu’on met une première couche de litière dans l’étable (on coùpe la boualhe pour foncer le tait).

Intransitivement, c’est aussi s’enfoncer ou descendre vers le fond (foncer den un pur, descendre vers le fond d’un puits).

L’itératif est aussi en usage (refoncer le tait od dez janiqes, refaire la litière avec de l’ajonc), mais il n’est pas toujours nécessaire et foncer peut aussi avoir valeur de refaire le fond, en particulier d’une chaise, la rempailler.
    C’est le fonçouz (ou refonçouz, rempailleur) qui effectue ce travail.

Son déverbal fonce est employé au féminin. Il représente une assiette creuse sans doute après ablation du substantif joint dans le groupe nominal qui devait être assiette fonce. On le retrouve dans une fonce tourneoere qui s’applique à une fondrière mouvante ou des sables mouvants.

Le privatif est défoncer qui se comprend comme enlever le fond, ce qui était particulièrement vrai pour un tonneau.
    Mais il est vite repris comme augmentatif au sens d’enfoncer (ça défonce partout e ça boulhone). On défonce aussi la terre en labourant profondément, d’où une défonceuze pour désigner une charrue destinée à ce travail de défonceriy (défonçage), ce qui corespond à la sous-soleuse dans l’équipement agricole moderne.

L’adjectif qui en résulte, défonçae (qui n’a plus de fond, pour une chaise) est repris adverbialement en tant qu’augmentatif (un chevao défonçae poussif, un cheval complètement poussif ; ûne beyte défoncey maovaeze, une bête très méchante).

L’adjectif régulier est plutôt éfonçae (un verbe à préfixe dé- rend un adjectif en é-).
    On l’utilise aussi au figuré et avair la compernoere éfoncey revient à manquer d’intelligence.

Si le verbe enfoncer n’amène aucun commentaire, il faut quand même remarquer que le gallo connaît enfonceùre pour enfoncement ou plus exactement, le résultat de cet enfoncement.
    Il faut aussi retenir fonçalhe qui désigne une planche qui va former le plancher de charrette. Comme il y en a plusieurs, on entendra plutôt les fonçalhes (n’y avaet lez reilhes e lez fonçalhes).
    C’est aussi un fond de litière dans une étable (cant le tait ét fraes tirae, on met ûne fonçalhe). Dans ce dernier sens, le terme est concurrencé par fonceùre (on fezaet ûne fonceùre od dez bougats).

La fonceùre désigne aussi la profondeur, le fond comme la fonçour.

La foncey s’applique à ce qui reste au fond.
    On parle aussi du foncier de qhulotte (fond de pantalon, celui qu’on use sur les bancs).

Le verbe foncir retient le fait de foncer, se précipiter et marque donc la préférence du gallo pour le 2° groupe.

Dans le domaine juridique, la foncialitae s’appliquait au fonds possédé par le propriétaire par opposition à ce même fonds possédé par le domanier.