ACADEMIY DU GALO

Académie du Gallo


(retour index)

Les Dossiers linguistiques de l'Académie du Gallo

La Pepineray : "Brun"


BRUN


On pense que ce serait les mercenaires germaniques qui auraient introduit ce terme dans le domaine roman. En tout cas, il a été très tôt latinisé en brunus. Son intérêt en gallo réside dans l’affaiblissement de sa voyelle devant une nasale, puis la métathèse qu’il a entraînée.

L’adjectif ne s’attarde pas sur la désignation de la couleur et s’éloigne rapidement vers des dérivations propres au gallo. Car si vous suggérez le brun à un gallésant, c’est plutôt le crépuscule qui lui vient à l’esprit. Cette acception est renforcée par le nom composé brun de neit ou plus courant encore au féminin, brûne ([brœn]) de neit. Le terme est resté très vivace pour faire part de la faible luminosité de l’atmosphère. Ceci fait qu’on retrouve aussi la brûney pour évoquer cette période à l’approche du soir, quand ça commence à brûner (ou brûnir ; brunir, s’assombrir, s’obscurcir) et qu’il faet brun (que la nuit tombe), que les animaux nocturnes sortent, car c’est la brûne (le terme est si attaché au crépuscule que sa seule évocation rappelle le soir).

Par rapprochement phonétique, l’embrun en est venu à désigner la brume du soir. Des suffixes s’entendent comme brûnayer (ou brûnalher ; commencer à faire nuit, s’assombrir). Nous sommes au moment où la nuit est brûnalhante (tombante). Mais le temps peut être embrûnalhae (obscurci, couvert).

Les autres dérivés autour de brun ramènent d’avantage à la couleur : brunard (brunâtre). Les oiseaux n’y échappent pas avec le chaod-brun (bruant jaune) et la brûnette (fauvette à tête noire, la femelle surtout). Les poules vont en hale-brun lorsqu’elles font leur mue (v. HALER), elles hale-brûnent. (en parallèle, on peut avoir hale-braner par influence de la première syllabe). Le brunaod représente le brûle-gueule à cause de sa teinte certainement, teinte qui sert également à désigner la cloison embrun ou embrûni (voire lembrun par agglutination de l’article ou emberni). Les premières cloisons séparant l’étable de la partie habitable étaient sans doute peintes de cette couleur brune.

Comme nous le disions plus haut, le groupe –un étant reconnu pour s’affaiblir en [œn], en se joignant au roulement du « r », il conduit brun à la métathèse dans berner (s’assombrir), bernaod (ténébreux, sombre, rembruni) ainsi que embernaodir (s’obscurcir, s’assombrir) qui induit l’adjectif embernaodi (sombre). Plus à la marge, on entend aussi s’embernoulher (s’assombrir ; il va moulher, ça s’embernoulhe).