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Académie du Gallo


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Les Dossiers linguistiques de l'Académie du Gallo

La Pepineray : "Garc"


GARC


    Attesté depuis 1130 sur le domaine d’oïl, ce terme est considéré comme l’ancien cas sujet de garson. Il a pour origine l’ancien bas-francique *wrakkjo (désignant le vagabond). C’est ce terme qu’on retouve aujourd’hui dans l’anglais wretch au sens de « malheureux, scélérat » après avoir transité sous la forme saxonne Wrecca du même sens.

    Les termes désignant le jeune homme dans le domaine d’oïl tranchaient selon l’origine sociale : valet désignant l’enfant noble, garçon celui de couche sociale inférieure.

    Ce terme pouvait même être injurieux. C’est ainsi que garce va être attesté dès cette époque au sens de « femme débauchée » en afr.

    En galo, il n’en est pas de même. Garce a été retenu simplement au sens de fille sans péjoration. La preuve en est dans son diminutif garcette au sens de fillette. Il n’en est plus de même cependant dans l’expression fiù de garce. Néanmoins, elle a quitté son sens injurieux pour se retrouver d’avantage avec un caractère interjectif.

    Retenons aussi que, quand le « r » est prononcé, nous n’avons plus un /ɑ/ d’arrière, mais un /a/ d’avant, ce qui laisse penser que le terme s’est développé directement à partir de l’étymon germanique et n’est pas passé par l’ancien français (d’où la graphie garc et non *gars). Le « r » est d’ailleurs attesté sur la majeure partie de la Haute-Bretagne sur la carte ALF (seules, la Loire-Inférieure et la frange occidentale font exception).

    Ce terme d’usage courant prend un caractère générique et c’est ainsi qu’on parle d’un garc dez boêz (bûcheron), un garc champeytr (garde champêtre). Puis on parle d’un grand garc (adolescent), un garc a marier (jeune homme) comme d’un vieuz garc (célibataire âgé). On entend aussi un garc manqae pour un garçon manqué.

    Ce caractère générique s’exprime dans le mot garçalhe. Ce suffixe péjoratif qu’on retrouve dans le français marmaille l’en approche. Cependant, en gallo, il peut désigner un seul enfant et être masculin comme féminin (je ne fus pas diqa effeulher lez chous pour vair si j’araes pas terouae un garçalhe) et plutôt en bas-âge d’ailleurs. Le terme peut être repris en tant qu’adjectif pour désigner quelqu’un de puéril. Ceci fait qu’on a aussi la garçalheriy (groupe d’enfants ou enfants dans leur ensemble ; il savent faere la soupe a toute la garçalheriy).

    Être garçalhouz, c’est se montrer affectueux à l’égard des enfants (ét pas pace q’ét deuz omes q’il ont pas de sentiments e q’il sont pas garçalhouz). Et en avoir, c’est être engarçalhae (dès le premier bien sûr). Par extension, on peut dire qu’un chef de famille, c’est un engarçalhae.

    Revenons au sens premier de jeune homme qui est effectivement attesté par l’emploi de garçon dans ce sens. Mais on se passe du suffixe dans maettr-garc qui désigne un fort gaillard, un colosse. C’est sans doute son altération en magarc, moêgarc qu’on retrouve avec le même sens. Autre attestation avec un préfixe : mei-garc pour virago, soit étymologiquement « à demi-homme ».

    Il eut été étonnant qu’il ne fut pas employé autour du comportement sexuel. C’est ainsi qu’un garcier désigne un bougre, un coureur de jupons (il ne s’en privaent pas lez garciers !). À l’inverse, une garçoniere est une fille qui court les garçons et par extension, une femme infidèle et immorale. On comprend mieux dans ce contexte l’expression « ma garciere de viy » (ma chienne de vie  ; je ne t’ae ren qhutae de toute ma garciere de viy).

    Il est rare que par figuration, un terme ne soit pas extrait de son contexte pour nommer une plante, un animal, un outil. On retrouve donc garc par son diminutif garcèo pour désigner une jeune anguille à ventre jaune. On l’entend d’ailleurs plus souvent sous son pluriel garciaos. Le chemin qui a mené à ce sens peut paraître étonnant, mais il a pu y avoir un croisement avec un autre étymon.